1. Introduction

Pour la première fois, une étude de l’Observatoire du football CIES se focalise exclusivement sur l’Amérique latine. Sur le modèle du recensement annuel effectué depuis 2009 au niveau de 31 ligues européennes, ce Rapport compare quatre championnats de première division d’Amérique latine du point de vue des caractéristiques démographiques des joueurs : la Serie A brésilienne, la Superliga argentine, la Primera División chilienne et la Liga MX mexicaine.

L’analyse porte sur sept thématiques complémentaires : le nombre de joueurs utilisés, leur âge, leur taille, la part d’expatriés, celle de joueurs formés au club et la proportion de nouvelles recrues au sein des effectifs. L’échantillon se compose des joueurs alignés dans des matchs de championnat lors du deuxième semestre de l’année 2019. Au total, l’étude couvre 79 clubs et 2’015 footballeurs.

2. Nombre de joueurs utilisés

En moyenne, les équipes étudiées ont utilisé 25,5 joueurs lors des matchs de championnat disputés à partir du 1er juillet 2019. D’importantes différences existent entre les championnats. Avec 31,6 footballeurs utilisés par club, les équipes de Serie A brésilienne sont celles ayant aligné le plus grand nombre de joueurs (+24% par rapport à la moyenne observée dans l’ensemble des ligues prises en compte).

Figure 1 : nombre moyen de joueurs utilisés, par ligue

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Figure 1 : nombre moyen de joueurs utilisés, par ligue (01/07/2019-31/12/2019)

Quatorze des quinze équipes ayant aligné au moins 30 joueurs sont brésiliennes. Le grand nombre de rencontres jouées au Brésil lors de la période étudiée n’explique qu’en partie les différences constatées. La volonté partagée par clubs et empresários de mettre en vitrine des joueurs pour susciter de l’intérêt de la part d’équipes étrangères et en accroître la valeur sur le marché des transferts rentre aussi en ligne de compte.

Figure 2 : clubs ayant utilisé le plus de joueurs

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Figure 2 : clubs ayant utilisé le plus de joueurs (01/07/2019-31/12/2019)

3. Âge

Les ligues analysées présentent des caractéristiques similaires du point de vue de l’âge des joueurs. Si les clubs chiliens ont aligné les compositions les plus expérimentées (28,2 ans en moyenne), le championnat le plus jeune, la Superliga argentine, regroupe aussi des joueurs relativement âgés (27,5 ans). Ce résultat reflète une même tendance à transférer rapidement vers l’Europe les jeunes les plus prometteurs, qui ne reviennent en Amérique du Sud qu’à un âge plus avancé.

Figure 3 : âge moyen sur le terrain, par ligue

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Figure 3 : âge moyen sur le terrain, par ligue (01/07/2019-31/12/2019)

Les trois seules équipes dont l’âge moyen sur le terrain se situe en dessous des 25 ans sont argentines. Avec des compositions en moyenne âgées de 23,1 ans, CD Godoy Cruz sort nettement du lot. Au moment de la rédaction du rapport, cette équipe occupait cependant la dernière place de la Superliga argentine. Les deux équipes les plus âgées sont chiliennes : Universidad de Conceptión (30,8 ans) et Curicó Unido (30,1 ans).

Figure 4 : clubs les plus jeunes/âgés (âge moyen)

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Figure 4a : clubs les plus jeunes (âge moyen) (01/07/2019-31/12/2019)
Figure 4b : clubs les plus âgés (âge moyen) (01/07/2019-31/12/2019)

4. Taille

La taille moyenne sur le terrain varie entre 177,4 cm en première division chilienne et 179,9 cm pour le premier niveau de compétition brésilien. La moyenne générale est de 178,9 cm. À titre de comparaison, cette valeur se situe autour de 182 cm en Europe. S’il rend parfois une migration plus difficile, le déficit de taille des joueurs d’Amérique latine est souvent compensé par une plus grande maîtrise technique. Cette situation rend le marché sud-américain très attractif aux yeux des recruteurs.

Figure 5 : taille moyenne sur le terrain (cm), par ligue

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Figure 5 : taille moyenne sur le terrain (cm), par ligue (01/07/2019-31/12/2019)

Aucun club brésilien ne figure parmi les dix équipes avec les valeurs les plus faibles en termes de taille moyenne sur le terrain. Par contre, il y en a sept parmi les dix avec les valeurs les plus élevées. Au-delà des différences dans la taille moyenne des populations des pays concernés, ce résultat traduit probablement aussi la préférence des équipes brésiliennes pour des joueurs de grande taille, plus facilement exportables vers l’étranger.

Figure 6 : clubs les plus petits/grands sur le terrain (taille en cm)

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Figure 6a : clubs les plus petits sur le terrain (taille en cm) (01/07/2019-31/12/2019)
Figure 6b : clubs les plus grands sur le terrain (taille en cm) (01/07/2019-31/12/2019)

5. Expatriés

D’importantes différences existent au niveau de la part de joueurs expatriés, à savoir ceux ayant grandi en dehors de l’association de leur club d’appartenance. À un extrême, seulement environ un dixième des minutes disputées en Serie A brésilienne l’ont été par des joueurs importés de l’étranger. À l’autre extrême, cette proportion dépasse la moitié en Liga MX mexicaine. La valeur mesurée en Argentine se rapproche de celle du Brésil, tandis que celle observée au Chili se situe à un niveau intermédiaire.

Figure 7 : % de minutes des expatriés, par ligue

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Figure 7 : % de minutes des expatriés, par ligue (01/07/2019-31/12/2019)

Les dix clubs où les footballeurs expatriés ont disposé du plus fort minutage sont mexicains, avec une valeur maximale de 65% pour Club Tijuana. La plus forte valeur pour une équipe non-mexicaine a été mesurée pour Curicó Unido (48,1%). À l’opposé, beaucoup d’équipes brésiliennes et argentines font partie de celles où les expatriés sont les moins nombreux. Deux d’entre elles, Arsenal de Sarandì et Cearà SC, n’en ont aligné aucun.

Figure 8 : plus bas/hauts % de minutes des expatriés

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Figure 8a : plus bas % de minutes des expatriés (01/07/2019-31/12/2019)
Figure 8b : plus hauts % de minutes des expatriés (01/07/2019-31/12/2019)

Avec 138 ressortissants, l’Argentine est de loin l’origine la plus représentée parmi les expatriés au sein des championnats analysés. Les Argentins sont particulièrement nombreux au Mexique et au Chili. Ils constituent également la première main d’œuvre étrangère au Brésil. Au total, ils représentent presqu’un tiers des expatriés. Trois autres pays ont des contingents d’expatriés particulièrement fournis : la Colombie, l’Uruguay et le Paraguay. Au contraire, seulement huit Brésiliens sont expatriés dans les ligues étudiées (tous au Mexique).

Figure 9 : principales origines des expatriés

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Figure 9 : principales origines des expatriés (01/07/2019-31/12/2019)

6. Formation

Les joueurs formés au club sont les footballeurs ayant été présents pendant au moins trois saisons entre 15 et 21 ans dans leur équipe d’appartenance. Cette catégorie de joueurs a disputé 16,8% des minutes dans les championnats étudiés. Le plus faible pourcentage a été mesuré en Liga MX mexicaine (13,3%), où les clubs emploient beaucoup de joueurs importés de l’étranger. La proportion la plus élevée a par contre été mesurée en Superliga argentine (22,6%), où plus de clubs misent sur les joueurs issus de leurs centres de formation pour composer leurs effectifs.

Figure 10 : % de minutes des joueurs formés au club, par ligue

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Figure 10 : % de minutes des joueurs formés au club, par ligue (01/07/2019-31/12/2019)

Les joueurs formés au club ont disputé une majorité de minutes de championnat dans seulement trois des 79 clubs pris en compte : CA Banfield, Gimnasia y Esgrima et Pumas UNAM. Ce dernier club constitue une exception notable dans le contexte mexicain. Deux des trois équipes n’ayant aligné aucun joueur formé au club sont mexicaines : FC Juárez et Atlético San Luis. La troisième, CS Alagoano, est brésilienne.

Figure 11 : plus bas/hauts % de minutes des joueurs formés au club

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Figure 11a : plus bas % de minutes des joueurs formés au club (01/07/2019-31/12/2019)
Figure 11b : plus hauts % de minutes des joueurs formés au club (01/07/2019-31/12/2019)

Boca Juniors est en tête du classement des clubs ayant formé le plus grand nombre de joueurs actifs au sein des ligues analysées. L’équipe de Buenos Aires devance trois autres clubs argentins : Vélez Sarsfield, River Plate et Newell’s Old Boys. Les plus grands formateurs au niveau des trois autres pays accueillant les championnats pris en compte sont São Paulo FC au Brésil, Atlas Guadalajara au Mexique et Universidad de Chile au Chili.

Figure 12 : principaux clubs formateurs

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Figure 12 : principaux clubs formateurs (01/07/2019-31/12/2019)

7. Recrutements

Les nouvelles recrues sont les joueurs ayant rejoint leur club d’emploi en cours d’année (à partir du 1er janvier 2019 dans ce cas). Les footballeurs issus des centres de formation ne sont pas inclus dans cette catégorie. Le pourcentage de nouvelles recrues est élevé dans l’ensemble des ligues étudiées. Dans tous les championnats, plus de 40% des joueurs sont présents dans leur équipe d’appartenance depuis moins d’une année. La plus forte instabilité des effectifs a été observée en première division chilienne (47,4%).

Figure 13 : % de nouvelles recrues, par ligue

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Figure 13 : % de nouvelles recrues, par ligue (01/07/2019-31/12/2019)

De nombreuses équipes mal classées figurent parmi celles avec la plus forte proportion de nouvelles recrues dans leur effectif. Le record a été observé chez les Brésiliens de CS Alagoano (76,7%), qui ont finalement été relégués. À l’opposé, de nombreuses équipes performantes figurent parmi les plus stables. En tête de liste on trouve les finalistes de la Copa Libertadores, River Plate, suivis par trois équipes mexicaines ambitieuses (Pumas UNAM, CF Monterrey et CF Tigres de la UANL).

Figure 14 : plus bas/hauts % de nouvelles recrues

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Figure 14a : plus bas % de nouvelles recrues (01/07/2019-31/12/2019)
Figure 14b : plus hauts % de nouvelles recrues (01/07/2019-31/12/2019)

8. Conclusion

Ce Rapport met en exergue quelques-unes des caractéristiques essentielles des principaux championnats d’Amérique latine. Il illustre notamment la spécificité de la Serie A brésilienne au regard du nombre pléthorique de joueurs utilisés par les équipes. Cette situation renvoie au statut du Brésil en tant que pays exportateur par excellence. De ce point de vue, une simple présence en Serie A peut ouvrir les portes vers un transfert dans des championnats étrangers, même si pas forcément les plus huppés.

L’étude montre également le rôle central de l’Argentine en tant que fournisseur de joueurs pour les championnats analysés. Les Argentins constituent en effet le contingent d’expatriés le plus nombreux tant au Mexique, qu’au Chili et au Brésil. Au contraire, seulement huit Brésiliens sont expatriés dans les ligues étudiées (tous au Mexique). Les autres pays ayant beaucoup de ressortissants dans les championnats pris en compte sont la Colombie, l’Uruguay et le Paraguay.

L’étude illustre aussi le cas unique de la Liga MX mexicaine du point de la vue de la présence de joueurs importés de l’étranger. Les expatriés y sont en effet majoritaires sur le terrain, alors qu’ils ne disputent qu’environ un dixième des minutes au Brésil et en Argentine. Avec environ un tiers du temps de jeu disputé par des expatriés, la Primera División chilienne se trouve dans une position intermédiaire.

Les championnats étudiés ne se différencient pas beaucoup en ce qui concerne l’âge des joueurs, qui est partout plutôt élevée (presque 28 ans en moyenne sur le terrain). Ce résultat reflète une même tendance à transférer rapidement vers l’Europe les jeunes joueurs les plus prometteurs, qui ne reviennent en Amérique du Sud qu’à un âge plus avancé.

Le Rapport met également en exergue le plus grand accent placé sur la valorisation de jeunes issus des centres de formation par les équipes argentines. Boca Juniors émerge en tant que principal club formateur, suivi par trois autres équipes d’Argentine : Vélez Sarsfield, River Plate et Newell’s Old Boys. Les plus grands formateurs au niveau des trois autres pays étudiés sont São Paulo FC au Brésil, Atlas Guadalajara au Mexique et Universidad de Chile au Chili.