1. Introduction
L’engouement populaire suscité depuis les années 2000 par les grandes manifestations entre équipes nationales de football féminines a fortement stimulé les investissements aussi à l’échelle des clubs. En Europe notamment, de plus en plus d’équipes parmi les plus compétitives chez les hommes ont eu à cœur de mettre sur pied des équipes performantes également chez les femmes.
La croissance économique du football féminin a amené plusieurs changements dans la configuration du marché du travail des footballeuses. Ce rapport étudie les évolutions intervenues lors des cinq dernières années (quatre pour l’Espagne) dans dix des principales compétitions mondiales du point de vue de l’âge des joueuses, de la part de footballeuses expatriées dans les effectifs, ainsi que de celle des joueuses déjà sélectionnées pour une équipe nationale A.
L’échantillon se compose des footballeuses ayant joué ou présentes au moins une fois sur le banc lors des matchs disputés sur l’arc de la saison. Pour l’année COVID de 2020, la NWSL américaine a été remplacée par un tournoi d’automne et pour la saison 2021 en cours, les valeurs ont été arrêtées au 07/06/2021. Depuis 2017, les effectifs moyens par équipe ont augmenté d’une manière continue à l’exception d’une légère diminution en 2020.
Figure 1 : nombre de joueuses par équipe (2017-2021)
Dix principales ligues féminines
2. Evolution de l’âge
Corollaire de la professionnalisation du football féminin, l’âge des joueuses sur le terrain (calculé au 1er janvier de chaque année) n’a cessé d’augmenter lors des cinq dernières saisons. D’un âge moyen de 24,3 ans en juin 2017, on passe à 25,3 ans en juin 2021. L’évolution vers des footballeuses plus expérimentées a été particulièrement marquée dans deux ligues bien structurées : la NWSL américaine (+2,1 ans) et la Women's Super League anglaise (+1,9 ans). Par championnat, en 2021, les valeurs varient entre 22,0 ans dans la Eredivisie Women néerlandaise et 27,8 ans dans la NWSL aux États-Unis.
Figure 2 : âge moyen sur le terrain (2017-2021)
Dix principales ligues féminines
Figure 3 : âge moyen sur le terrain, par ligue (2021)
En juin 2021, six des huit équipes avec les joueuses les plus âgées sur le terrain se situaient aux États-Unis. La valeur maximale a été enregistrée pour Orlando Pride : 29,5 ans en moyenne. À l’opposé, cinq équipes néerlandaises étaient les plus jeunes parmi les 115 incluses dans l’échantillon. Les footballeuses de l’équipe la moins expérimentée dans l’absolu, VV Alkmaar, n’avaient en moyenne que 19,5 ans. Ce résultat reflète le positionnement du championnat des Pays-Bas comme tremplin pour des jeunes talents.
Figure 4 : âge moyen sur le terrain, par club (2021)
3. Evolution des expatriées
Le développement économique du football féminin de club a eu comme corollaire une augmentation de la mobilité internationale des joueuses. L’accroissement de la proportion de footballeuses expatriées, à savoir celles ayant grandi dans une association différente de celle du club d’emploi, traduit ce processus. De 21,6% en juin 2017, la part d’expatriées est passée à 33,0% en juin 2021. L’internationalisation a été particulièrement forte en Women's Super League anglaise (+19,6%). Par ligue, en 2021, le taux d’expatriées s’étend entre à peine 8,1% en Eredivisie Women néerlandaise et 47,0% en Women's Super League.
Figure 5 : % de minutes des expatriées (2017-2021)
Dix principales ligues féminines
Figure 6 : % de minutes des expatriées, par ligue (2021)
Nombre d’équipes parmi les plus compétitives sont majoritairement composées de joueuses ayant grandi dans une association nationale autre que celle du club représenté. C’est notamment le cas pour Arsenal WFC et Atlético Madrid Féminas, dont les joueuses expatriées ont disputé plus de 70% du temps de jeu. Ce pourcentage est supérieur à 50% dans 20 des 115 clubs étudiés. Le plus faible pourcentage a été mesuré pour 7 équipes (0.0%).
Figure 7 : % de minutes des expatriées, par club (2021)
Au niveau des origines, les USA sortent du lot en tant que principale origine des expatriées. Avec 87 footballeuses à l’étranger, elles étaient plus que deux fois plus nombreuses que la deuxième origine la plus représentée, la Suède (39). Les ressortissantes américaines sont présentes dans toutes les ligues étudiées, avec un maximum de 20 joueuses tant en France qu’en Espagne. En tout, 70 associations avaient au moins une représentante expatriée dans l’un des dix championnats analysés.
Figure 8 : principales origines des expatriées (2021)
Dix principales ligues féminines
4. Evolution des internationales
La présence croissante d'expatriées est allée de pair avec une augmentation de l'utilisation de footballeuses ayant déjà une expérience dans une sélection nationale A. La part de minutes des internationales est passée de 39,9% en 2017 à 45,9% en 2021. Lors de la dernière saison, les internationales ont disputé plus de la moitié des minutes dans trois championnats : la Women's Super League anglaise (66,2%), la NWSL américaine (52,9%) et la Féminine Division 1 française (50,7%).
Figure 9 : % de minutes des internationales (2017-2021)
Dix principales ligues féminines
Figure 10 : % de minutes des internationales, par ligue (2021)
Avec 23 membres de l’effectif de juin 2021 ayant une expérience dans une sélection nationale A, les Allemandes de Wolfsburg détiennent le record du nombre d’internationales. Cinq autres équipes en disposaient d'au moins 20 : Chelsea FC, Club Atlético de Madrid, FC Bayern München, Olympique Lyonnais et Arsenal WFC. Cette liste donne à voir l’impact prépondérant de l’entrée en scène des grands clubs masculins sur l’évolution du football féminin.
Figure 11 : nombre d’internationales par club (2021)
5. Conclusion
L’entrée en scène progressive des grands clubs masculins dans le football féminin a amené des profonds changements dans la structuration de ce dernier. Les nouveaux moyens investis ont notamment stimulé la mobilité internationale des footballeuses. Dans les dix ligues étudiées, la part des joueuses expatriées est passée de 21,6% en 2017 à un record de 33,0% en 2021.
Le développement du football féminin en Europe a encouragé de plus en plus de joueuses des États-Unis à s’expatrier. En juin 2021, avec 87 ressortissantes dans les championnats couverts, les États-Unis étaient de loin l’origine expatriée la plus représentée, devant la Suède (39 footballeuses) et le Canada (37 joueuses).
La montée en puissance des clubs traditionnellement masculins dans le football féminin est aussi un phénomène mis en exergue par l’étude. Elle ressort notamment en parcourant le classement des équipes avec le plus grand nombre de joueuses internationales. Aux 15 premières places de ce classement, on trouve en effet 14 équipes dont le pendant masculin évolue dans l’un des cinq grands championnats européens (big-5). Cette tendance se poursuivra certainement dans les années à venir.