1. Introduction

Le 69ème Rapport Mensuel analyse les données du recensement annuel mené depuis 2009 par l’Observatoire du football CIES sur les joueurs de 31 premières divisions masculines européennes. Nous présentons dans un premier temps les évolutions constatées sur le plan démographique, pour ensuite mettre en exergue les clubs qui se différencient le plus des rivaux de la même ligue du point de vue de l’âge, de la présence de joueurs formés au club, de celle des expatriés, ainsi que de la stabilité.

Pour 2021, l’échantillon se compose de 12'141 footballeurs répartis dans les 473 équipes (25,7 joueurs par club) des 31 premières divisions prises en compte. Pour certaines analyses, les ligues ont été catégorisées en quatre niveaux selon leur rang moyen dans le classement UEFA lors de la période entre 2009 et 2021. Le premier niveau se compose des championnats du big-5, le deuxième comprend six ligues, tandis que les troisième et dernier niveaux comptent chacunes dix compétitions.

Les joueurs pris en compte faisaient partie de l’effectif de la première équipe des clubs analysés au 1er octobre (20 octobre pour 2020). Ils devaient aussi avoir joué en championnat lors de la saison en cours ou, le cas échant, avoir disputé des rencontres dans des ligues adultes lors de chacune des deux saisons précédentes (équipes B non comprises). Les deuxièmes et éventuels troisièmes gardiens ont été inclus dans tous les cas.

Figure 1 : échantillon de l’étude

Octobre 2021

2. Évolutions démographiques

La première analyse longitudinale concerne la part des joueurs formés au club dans les effectifs. Cette catégorie définit les footballeurs ayant évolué au moins trois saisons entre 15 et 21 ans dans leur équipe d’emploi. Après avoir constamment baissé de 2009 à 2018, le pourcentage de joueurs issus des académies de leur club d’appartenance a légèrement augmenté pour une troisième année consécutive. Son niveau reste néanmoins bien inférieur à celui enregistré lors des premières années du recensement.

Figure 2a : % de joueurs formés au club

2009-2021 (1er Octobre)

La légère augmentation des joueurs formés au club depuis 2018 a surtout concerné les équipes des ligues les moins compétitives (+1,6%), là où la baisse avait été la plus forte entre 2009 et 2018 (-9,5%). Sur l’ensemble de la période, les écarts entre les différents niveaux de ligues ont eu tendance à diminuer. Néanmoins, les équipes des deux meilleurs niveaux continuent d’être composées par une plus faible proportion de joueurs formés par leurs soins que celles des deux échelons inférieurs.

Figure 2b : % de joueurs formés au club, par niveau de ligue

2009-2021 (1er Octobre)

Le deuxième indicateur analysé concerne la part des expatriés dans les équipes. Cette catégorie définit les joueurs ayant grandi dans une autre association que celle du club d’emploi. Après avoir constamment augmenté jusqu’en 2019, la part de footballeurs importés avait légèrement diminué en 2020 dans le contexte de la pandémie. En 2021, par contre, un nouvel accroissement a été enregistré et le pourcentage d’expatriés est remonté jusqu’au niveau record de 2019.

Figure 3a : % de joueurs expatriés (2009-2021)

2009-2021 (1er Octobre)

Depuis 2009, la part d’expatriés dans les effectifs a augmenté dans tous les niveaux de ligues. L’internationalisation a été particulièrement marquée au sein des ligues les moins compétitives, bien que le pourcentage d’expatriés y demeure plus bas que dans les meilleurs championnats. En 2021, pour la première fois, les expatriés représentent plus de la moitié des joueurs dans les cinq grandes ligues européennes.

Figure 3b : % de joueurs expatriés, par niveau de ligue

2009-2021 (1er Octobre)

Le troisième critère sélectionné pour mesurer l’évolution démographique du football européen est la stabilité des effectifs. La variable choisie est la part des nouvelles recrues dans les effectifs, à savoir les joueurs recrutés depuis le 1er janvier de l’année du recensement. Les footballeurs de retour de prêt sont aussi pris en compte, tandis que ceux issus des centres de formation ne le sont pas. Après avoir tendanciellement augmenté jusqu’en 2017, la part de nouveaux joueurs a progressivement diminué pour retrouver en 2021 un niveau qui n’avait été plus mesuré depuis 2012.

Figure 4a : % de nouvelles recrues

2009-2021 (1er Octobre)

La part de nouvelles recrues est traditionnellement plus faible dans les clubs des championnats du big-5 qu’à l’échelle des autres niveaux de ligues. Les écarts se sont néanmoins creusés au fil du temps, et en particulier depuis 2017, faisant miroir à la polarisation économique du football européen. La capacité à conserver un bon niveau de stabilité dans l’effectif fait partie de l’avantage compétitif dont disposent les clubs les plus riches.

Figure 4b : % de nouvelles recrues, par niveau de ligue

2009-2021 (1er Octobre)

3. Clubs atypiques

Ce chapitre présente les équipes dont la composition de l’effectif s’écarte sensiblement de celle observée au sein de leur ligue d’appartenance. Le premier indicateur analysé est l’âge moyen des joueurs. Les Ukrainiens de Mariupol sont l’équipe la plus jeune comparativement à leurs rivaux (-4,07 ans), suivie par les Danois de Nordsjaelland (-3,73 ans). Ces derniers présentent la valeur la plus faible parmi les 473 équipes analysées (20,81 ans), alors que la ligue slovaque est la plus jeune (24,53 ans).

Figure 5 : clubs les plus jeunes par rapport à la moyenne de la ligue

2009-2021 (1er Octobre)

Les Bulgares de Pirin Blagoevgrad sont le club disposant des joueurs les plus âgés par rapport à la moyenne mesurée dans la ligue d’appartenance (+3,76 ans). Deux équipes des cinq grands championnats se trouvent parmi les dix clubs s’écartant le plus de leurs rivaux : les Anglais de Burnley et les Espagnols d’Elche. Les valeurs extrêmes ont été enregistrées dans les championnats turc et grec à l’échelle des ligues (27,59 ans), ainsi que pour Burnley (29,91 ans) au niveau des clubs.

Figure 6 : clubs les plus âgés par rapport à la moyenne de la ligue

2009-2021 (1er Octobre)

Les Slovaques de MŠK Žilina ne sont pas seulement le club où la part de joueurs formés sur place est la plus élevée (79,2%), mais aussi celui s’écartant le plus de la moyenne dans la ligue d’appartenance (+56,0%). Žilina devance trois autres équipes où les joueurs formés au club composent une majorité de l’effectif, dont Athletic Club. Un autre club basque, Real Sociedad, est aux dix premiers rangs. La valeur la plus élevée par ligue a été mesurée en Norvège (29,2%).

Figure 7 : clubs avec le plus fort % de joueurs formés au club par rapport à la moyenne de la ligue

Octobre 2021

Au total, 39 des 473 équipes analysées n’ont aucun joueur formé au club dans leur effectif. Parmi celles-ci, les Suédois d’Östersunds sont ceux dont l’écart par rapport à la ligue d’appartenance est le plus marqué (-24,8%). Trois équipes espagnoles font aussi partie des dix clubs les plus atypiques du point de vue de la présence de footballeurs formés sur place : Getafe, Granada et Elche. La valeur la plus faible par ligue a été enregistrée en Turquie (8,5%).

Figure 8 : clubs avec le plus faible % de joueurs formés au club par rapport à la moyenne de la ligue

Octobre 2021

Si les Grecs d’Aris FC (88,5%) sont ceux où le pourcentage d’expatriés est le plus élevé, les Bulgares de Lodogorets s’écartent le plus par rapport à la moyenne de leur ligue (+46,3%). Les trois clubs derrière Lodogorets disputent la phase de poules de la Ligue des champions : Atlético de Madrid, RB Salzburg et LOSC Lille. Paris St-Germain a aussi un profil atypique du point de vue de la présence de footballeurs expatriés. La valeur la plus forte par ligue a été observée à Chypre (69,9%).

Figure 9 : clubs avec le plus fort % d’expatriés par rapport à la moyenne de la ligue

Octobre 2021

Les Hongrois de Paksi FC s’écartent le plus de la moyenne de leur ligue en ce qui concerne la présence expatriée (-45,2%). Ils ne disposent d’aucun footballeur ayant grandi à l’étranger. Athletic Club et les Ukrainiens de Desna sont les deux seules autres équipes se trouvant dans ce cas de figure. Les plus faibles pourcentages d’expatriés par ligue ont été enregistrés au sein des premières division serbe (16,2%) et ukrainienne (19,0%).

Figure 10 : clubs avec le plus faible % d’expatriés par rapport à la moyenne de la ligue

Octobre 2021

Pour mesurer la stabilité des équipes, nous avons pris dans ce cas en compte le nombre moyen d’années pendant lesquels les joueurs ont été présents dans l’effectif de la première équipe de leur club d’appartenance. La valeur la plus élevée dans l’absolu a été enregistrée pour CSKA Moskva (4,83 ans), devant Real Madrid (4,66 ans) et Athletic Club (4,56 ans). Avec Shakhtar Donetsk, ces équipes sont aussi celles qui s’écartent le plus des rivaux de leur ligue. La plus longue permanence moyenne par championnat a été mesurée en Premier League anglaise (3,23 ans).

Figure 11 : clubs avec les joueurs le plus longuement présents par rapport à la moyenne de la ligue

Octobre 2021

Elche CF dispose de l’effectif le moins stable par rapport à la moyenne observée dans sa ligue (-1,16 ans). Trois des quatre autres équipes du big-5 aux dix premiers rangs sont des néo-promus anglais ayant fortement investi pour renforcer leur effectif : Brentford, Norwich City et Watford. La dernière, Séville, a une politique très axée sur la réalisation de plus-values sur le marché des transferts. Les Biélorusses de Dinamo Brest (1,00 ans) et le championnat cypriote (1,76 ans) présentent les valeurs les plus faibles par club et par ligue.

Figure 12 : clubs avec les joueurs le moins longuement présents par rapport à la moyenne de la ligue

Octobre 2021

4. Conclusion

Après la baisse de 2020, la première année post-pandémie a ramené la part de footballeurs expatriés au niveau record mesuré en 2019 : 41,9%. Pour la première fois depuis le début des recensements en 2009, les joueurs ayant grandi en dehors de l’association de leur club d’emploi représentent la majorité des joueurs actifs au sein des cinq grands championnats européens. Par contre, l’accroissement le plus marqué sur l’arc de la période étudiée a été observé au sein des championnats les plus faibles.

Malgré l’accroissement des expatriés, la présence de joueurs formés au club a aussi continué à augmenter après la pandémie. Le niveau des footballeurs issus des académies des équipes d’appartenance reste néanmoins beaucoup moins élevé que la moyenne mesurée entre 2009 et 2015 : 18% contre 21,8%. La légère augmentation récente s’explique essentiellement par la hausse constatée au niveau des ligues les moins compétitives.

Une tendance plus nette a été observée en ce qui concerne la stabilité des équipes. Alors qu’en 2017 la part de joueurs recrutés en cours d’année avait atteint le niveau record de 44,9%, en 2021, les nouvelles recrues ne représentent plus que 40,4% des effectifs. Il s’agit du niveau le plus bas observé depuis 2012, reflet d’un marché des transferts moins frénétique. Plus axés sur le long terme, les clubs des ligues les plus compétitives sont ceux disposant des effectifs les plus stables.