1. Introduction

Le 75ème Rapport Mensuel de l’Observatoire du football CIES analyse les origines des joueurs expatriés lors de la période 2017-2022 dans 135 ligues professionnelles à travers le monde : 83 européennes, 20 asiatiques, 18 sud-américaines, dix nord-américaines et quatre africaines. Les données présentées font référence à la situation observée au 1er mai de chaque année.

Figure 1 : échantillon de l’étude (01/05/2022)

Entre le 1er mai 2017 et la même date en 2022, au sein des 135 championnats couverts dans cette analyse, le nombre de joueurs évoluant en dehors du pays dans lequel ils ont grandi et partis à l’étranger pour des raisons footballistiques – les expatriés – a augmenté de presque 2'000 unités : de 11'983 à 13’929 (+16%).

Au 1er mai 2022, les équipes analysées réunissaient en moyenne 6,3 expatriés (5,5 en 2017), ce qui représente 22,0% de leurs effectifs (20,5% en 2017). Le plus fort nombre et proportion d’expatriés ont été observés dans les ligues de pays membres de l’UEFA (7,7 par équipe, 27,3%), tandis que les valeurs les plus faibles ont été enregistrées dans les championnats d’associations de la CONMEBOL (2,9 par équipe, 9,2%).

Aucun changement notable n’a été observé au niveau de l’âge des expatriés, qui reste stable autour de 26,9 ans. En 2022, le maximum a été mesuré en Asie (29,3 ans), où le nombre d’expatriés est restreint par des quotas relativement stricts et les clubs tendent à se focaliser sur l’importation de footballeurs expérimentés. L’Europe se trouve dans une situation opposée.

Figure 2 : présence expatriée, par confédération (01/05/2022)

Depuis 2017, la part des expatriés a légèrement diminué au sein des vingt ligues asiatiques (-0,6%), des quatre championnats africains (-1,1%) et des dix nord-américains (-0,3%) étudiés, tandis qu’elle s’est accrue en Amérique du Sud (+1,2%) et, surtout, en Europe (+2,8%), où elle était bien élevée en 2017. Ce résultat illustre le rôle de plaque tournante joué par l’Europe dans le marché global des footballeurs.

Figure 3 : % d’expatriés, par confédération (2017-2022)

2. Principales origines expatriées

Le Brésil est le principal pays d’exportation des footballeurs. Au 1er mai 2022, il y avait 1’219 joueurs originaires de ce pays qui évoluaient à l’étranger dans les championnats analysés. La France (978) est le deuxième principal exportateur de joueurs, suivie par l’Argentine (815). La part de joueurs expatriés au sein de ligues de la même confédération varie grandement entre ces trois origines : 90,0% pour les Français, 46,1% pour les Argentins et 3,5% à peine pour les Brésiliens.

Le quatrième place de l’Angleterre s’explique essentiellement par la forte présence de joueurs ayant grandi dans ce pays dans les équipes d’autres nations britanniques et d’Irlande : environ 57% de l’ensemble des expatriés anglais. Parmi les vingt principales origines des expatriés, la plus forte concentration de joueurs au sein de la première destination a été enregistrée pour les Belges (29,6% aux Pays-Bas), tandis que la plus faible a été mesurée pour les Nigérians (6,8% en Turquie).

Figure 4 : principales origines des expatriés (01/05/2022)

[Assoc.] Nombre d'associations dans lesquelles sont recensés les expatriés

Entre 2017 et 2022, la plus forte évolution positive a été mesurée pour la France, pays dont le nombre de footballeurs expatriés a augmenté de 770 à 978 (+27%). Les Pays-Bas (+137, +60%) et la Colombie (+124, +41%) complètent le podium des nations ayant connu les plus fortes augmentations de ressortissants dans des clubs étrangers. À l’opposé, les plus fortes baisses ont été mesurées pour la Serbie (-69 expatriés), la Roumanie (-46) et la Corée du Sud (-43).

Figure 5 : principales augmentations du nombre d'expatriés, par association d’origine (2017-2022)

Par confédération, entre 2017 et 2022, le nombre d’expatriés n’a diminué que pour les ressortissants d’associations membres de l’AFC (-10 expatriés, -2%). Une hausse de 10% ou plus a été enregistrée pour l’ensemble des autres continents, ce qui traduit l’accroissement global des migrations internationales des footballeurs au sein d’un marché faisant de plus en plus fi des frontières.

Figure 6 : évolution du nombre d'expatriés par confédération d’origine (2017-2022)

3. Principales routes migratoires

L’axe Brésil-Portugal constitue la principale route migratoire du football. Au 1er mai 2022, 231 joueurs ayant grandi au Brésil évoluaient dans des clubs des trois premières divisions portugaises. Les sept principaux axes migratoires suivants relient des pays voisins : Angleterre et Écosse ou Pays de Galles, Argentine et Chili, France et Luxembourg, Belgique ou Angleterre, ainsi que Croatie et Slovénie.

L’importance de l’axe Allemagne-Turquie s’explique par la migration de retour de nombreux joueurs aux origines turques ayant grandi en Allemagne. D’une manière générale, même dans un marché aussi globalisé que celui du football professionnel, la plupart des migrations ont toujours cours entre pays géographiquement proches.

Figure 7a : principaux axes migratoires (01/05/2022)

Figure 7b : carte des principaux axes migratoires (01/05/2022)

Figure 7b : carte des principaux axes migratoires (01/05/2022)

Parmi les trois principaux pays exportateurs, la logique de proximité est particulièrement visible pour la France. En effet, un peu plus de la moitié des footballeurs français expatriés évoluent dans un pays proche : 13% au Luxembourg, 10% en Belgique, 9% en Angleterre, 8% en Italie, 6% en Espagne et 5% en Suisse. Au contraire, un faible nombre de Brésiliens expatriés évoluent à proximité de leur pays d’origine, tandis que les Argentins sont dans une situation intermédiaire.

Figure 8 : associations d’emploi des expatriés argentins, brésiliens et français (01/05/2022)

4. Conclusion

Depuis 2017, le nombre de joueurs expatriés au sein des équipes des 135 ligues étudiées a fortement augmenté. Au 1er mai 2022, 13’929 footballeurs évoluaient en dehors du pays où ils ont grandi : +1’946 joueurs par rapport à la même date en 2017 (+16%). Les expatriés représentent désormais 22% de l’ensemble des joueurs, avec un maximum de 27% en Europe et un minimum de 9% en Amérique du Sud.

La décision récente de la confédération asiatique de permettre aux clubs engagés en Ligue des champions d’aligner dès la saison 2023/24 jusqu’à six footballeurs étrangers au lieu des quatre consentis jusqu’ici s’inscrit pleinement dans le contexte mondial actuel d’accroissement de la présence expatriée dans les clubs. Cette tendance n’est pas prête à s’arrêter.

Le Brésil demeure le principal exportateur de footballeurs. Néanmoins, après le pic enregistré en 2019, le nombre de Brésiliens expatriés dans les championnats analysés a diminué pour la troisième année consécutive. À l’opposé, la présence à l’étranger des ressortissants du deuxième plus grand pays exportateur, la France, a atteint son maximum historique en 2022. L’écart entre Brésiliens et Français est ainsi passé de 407 expatriés en 2017 à 241 en 2022. Dans un avenir pas si lointain, la France pourrait donc dépasser le Brésil en tant que principal exportateur de footballeurs.