Introduction

Ce rapport étudie dans une perspective spatiale la présence de footballeurs expatriés dans les championnats professionnels. Les expatriés sont définis comme des joueurs évoluant dans une association différente de celle où ils ont grandi, qu’ils ont quitté suite au recrutement par un club à l’étranger. Cette définition permet de cibler l’étude sur les joueurs ayant migré pour des raisons footballistiques, indépendamment de leur nationalité sportive ou des passeports détenus.

L’analyse porte sur 135 ligues à travers le monde, dont 83 d’associations membres de l’UEFA, avec le 1er mai comme date de référence, tant pour 2024 que pour 2020, année choisie afin de présenter des données évolutives. Actuellement, les expatriés représentent 24,3% des effectifs, avec un maximum de 29,3% au sein des ligues européennes et des minima de 11,7% et 12,5% en Amérique du Sud et en Afrique respectivement.

Figure 1: échantillon de l'étude (mai 2024)

En termes d’évolution, le nombre d’expatriés au sein des 135 ligues analysées a augmenté de 19,2% depuis 2020: de 12'841 à un nouveau record de 15'310. En valeur absolue, la plus forte augmentation a été enregistrée en Europe (+1'713 expatriés), tandis qu’en termes relatifs, l’accroissement le plus marqué a été observé en Amérique du Sud (+41,9%). Historiquement peu enclins à importer des joueurs de l’étranger, les clubs sud-américains ont aussi commencé à en recruter davantage.

Figure 2: évolution du nombre d’expatriés (2020-2024)

Origines

Trois pays sortent du lot en tant que principaux exportateurs de footballeurs: les quintuples champions du monde du Brésil (1’338 joueurs), ainsi que les deux derniers vainqueurs de la Coupe du Monde: la France (1’091) et l’Argentine (995). Les joueurs ayant grandi dans ces pays représentent 22,4% des expatriés actifs dans les 135 ligues étudiées, ce qui reflète un savoir-faire inégalé en matière de développement de footballeurs de haut niveau.

Avec 946 joueurs, la France fournit le plus gros contingent d’expatriés aux clubs des 83 championnats européens de l'échantillon couvert, devant le Brésil et l’Angleterre. L’Argentine est en tête de liste pour les équipes sud-américaines (518 joueurs), suivie par l’Uruguay et la Colombie. Ce dernier pays devance l’Argentine en tant que principal exportateur vers l’Amérique du Nord et centrale (154 joueurs), tandis que le Brésil écrase la concurrence en Asie (410 joueurs).

Figure 3: principales origines des expatriés (2024)

Les gagnants des deux dernières éditions de la Coupe du Monde sont aussi les nations dont le nombre de ressortissants à l’étranger a le plus augmenté entre 2020 et 2024: la France (+273 expatriés) et l’Argentine (+220). Le nombre d’expatriés anglais (+141), danois (+111) et nigérians (+103) a également augmenté de plus de 100 unités lors des cinq dernières années. La plus forte diminution a par contre été enregistrée pour les Serbes (-46).

Figure 4: plus fortes augmentations du nombre d’expatriés, par origine (2020-2024)

Destinations

Si la mobilité internationale des footballeurs est toujours influencée par des critères géo-historiques, des nouvelles routes migratoires émergent dans un contexte de globalisation.

En ce qui concerne les expatriés brésiliens, le Portugal demeure leur principale destination, mais leur nombre y a diminué depuis 2020 (-34), au même titre que dans un autre pays d’importation traditionnel, l’Italie (-24). La présence brésilienne a par contre augmenté dans des destinations moins historiques comme la Corée du Sud (+26) et les États-Unis (+18).

Figure 5: évolution de la présence des expatriés brésiliens, principales destinations (2020-2024)

Le Luxembourg constitue la première destination des expatriés français (132 joueurs). Ce même pays est aussi celui où le nombre de Français a le plus augmenté lors des cinq dernières années (+54), devant un autre pays limitrophe, la Suisse (+30). Les clubs d’une association un peu plus lointaine ont aussi intensifié leurs recrutements en France: la Bulgarie (+27). Dans les trois cas, les migrations concernent des joueurs n’ayant pas trouvé leur place au sein des meilleures équipes françaises. L’Angleterre est le seul pays parmi les dix principales destinations des Français où leur nombre a fléchi.

Figure 6: évolution de la présence des expatriés français, principales destinations (2020-2024)

Si le Chili est la première destination des expatriés argentins (136), le Pérou est l’association où leur nombre a le plus augmenté depuis 2020 (+43). De plus en plus d’Argentins s’expatrient aussi au Brésil (+32) et en Uruguay (+24), tandis qu’une baisse conséquente a été constatée au Mexique (-24). Parmi les principaux pays de destination des expatriés argentins, une diminution a été également enregistrée pour l’Espagne. Dans tous les autres cas, la tendance est à la hausse.

Figure 7: évolution de la présence des expatriés argentins, principales destinations (2020-2024)

Les plus fortes augmentations d’une origine dans une destination depuis 2020 donnent à voir l’intensification des migrations de joueurs d’associations plus compétitives vers des pays footballistiquement moins développés: les Français au Luxembourg, les Argentins au Pérou, les Croates en Bosnie, les Anglais en Écosse ou encore les Allemands en Autriche. Ce phénomène explique en grande partie l’augmentation générale de la présence de joueurs expatriés dans les clubs.

Figure 8: plus fortes augmentations d’une origine dans une destination (2020-2024)

Conclusion

Les clubs du monde entier font plus que jamais appel à des footballeurs expatriés. Un nouveau record à l’échelle des 135 ligues étudiées a été enregistré en 2024. Depuis 2020, leur nombre y a augmenté de presque 20%. Par continent, l’accroissement relatif le plus important a été observé en Amérique du Sud (+42%), où la proportion d’expatriés dans les effectifs a dépassé pour la première fois le seuil de 10%, suivie par l’Asie (+24%), où ce pourcentage a franchi la barre de 20%.

Notre analyse montre que l’importation de joueurs ayant grandi à l’étranger est un phénomène touchant désormais un plus grand nombre de clubs et de ligues à travers le monde. La mobilité des joueurs se fait de plus en plus à travers des réseaux de transfert transnationaux, non plus seulement pour les footballeurs les plus talentueux, mais aussi pour les joueurs évoluant à des échelons inférieurs du football professionnel.

Trois pays se détachent en tant que principaux exportateurs de joueurs: le Brésil, la France et l’Argentine. Alors que les Brésiliens restent les plus représentés à l’étranger, lors des cinq dernières années, leur nombre s’est beaucoup moins accru (+86 expatriés) que celui des ressortissants des deux derniers champions du monde: les Français (+273) et les Argentins (+220). Les plus fortes augmentations au niveau des autres confédérations ont été enregistrées pour les Nigérians (+103 expatriés), les Japonais (+82) et les États-Uniens (+54).